Vente

La vente des cheveux est un marché.
La pauvreté en a souvent été la cause.
Dans « Les Misérables » de Victor Hugo, Fantine la mère de Cosette vend ses cheveux & ses dents pour nourrir sa fille.
En 2009 des espagnoles victimes de la crise économiques vendent pour 150 € leur chevelure. Certains sites proposent sur internet des prix allant jusqu’à 1000 $ pour une longueur de 75 cm.
La vente des cheveux est en pleine expansion. La mondialisation a développé un marché qui existait depuis longtemps. La demande croissante d’extensions des femmes occidentales & africaines doit être satisfaite par la vente massive de leurs cheveux par les femmes indiennes & chinoises.
Ce marché convoité, la Chine s’en est emparé en faisant de Xuchang la capitale mondiale du cheveu, selon Doan Bui dans l’article du Nouvel Observateur du 20-26 janvier 2011.
Zheng Youkan PDG de Rebecca Hair Product, leader mondial de la perruque & des extensions, est issu d’une famille qui travaille dans le cheveu depuis des générations. Enfant, il parcourait les villages du Henan à bicyclette pour acheter les chevelures de jais des femmes.  La collecte de cheveux s’effectue depuis des siècles dans cette région.
La réputation des cheveux des chinoises était connue au XVIII ème siècle & les marchands européens venaient déjà se fournir ici pour les fabricants de perruques. Les clients étaient alors les nobles, les juges & les avocats.
Zheng a créé sa première usine en 1999 à laquelle il a donné le nom de l’héroïne de Daphné du Maurier, Rebecca, & qui contrôle aujourd’hui toute la filière. La société entrée en bourse, achète 200 tonnes de cheveux par an. Si le marché des perruques, notamment à usage thérapeutique, perdure c’est grâce à celui plus récent des extensions, popularisées par les stars de Hollywood, que la firme prospère.

La Chine a évincé l’Inde, sa rivale & concurrente. Bien que disposant du même atout, une énorme population offrant une réserve immense de matière première, & d’un avantage, celui de la collecte simplifiée, l’Inde n’a pas suivi le développement industriel chinois. STCD, la plus grosse entreprise indienne du secteur reste artisanale.
Le  « temple hair« , cheveu offert par les pèlerins aux dieux en particuliers au temple de Tirupani pourtant plus proche du cheveu européen car moins raide & plus fin, est vendu aux enchères par les prêtres.
Surnommé le » happy hair » car donné dans la sérénité, il est très populaire auprès des sociétés qui fabriquent les extensions.
Autre source d’approvisionnement, le cheveu européen vaut de l’or. La blondeur originelle des cheveux des ukrainiennes ou des russes est très convoitée. Mais sa récolte est parfois beaucoup moins sereine que celle des indiennes. Certaines sociétés russes rasent les prisonnières pour vendre leurs chevelures, un collecteur a été abattu dans l’Oural en 2006 & des femmes se font agresser & couper leurs précieuses tresses blondes.
David Elman, le patron de Raw Virgin Hair, société d’importation spécialisée dans le cheveu blond, le confirme : ce sont des cheveux intacts, non traités, non décolorés, non teints,  » de l’or à l’état pur « . Seulement il n’en récolte qu’1,5 tonne par an & la demande est plus importante que l’offre. Les africaines elles aussi raffolent des extensions. Que ce soit dans le quartier de Château Rouge à Paris ou dans les villes du continent, ces femmes ont un gros budget coiffure.
Il faut donc tresser des millions d’extensions.
C’est ce que font toute l’année les femmes des villages du Henan en Chine, mais aussi d’autres « travailleuses » qui se voient contraintes dans les camps à confectionner des produits capillaires pour le compte de Rebecca Hair Product, selon un rapport sur le travail forcé en Chine .
Couper les cheveux de femmes en Asie qui traditionnellement les portaient longs, pour allonger & augmenter le volume des chevelures de femmes en Afrique, en Europe et en Amérique est un commerce qui devrait perdurer malgré les abus qu’il entraîne.

La vente  entraîne la circulation des cheveux d’un continent à l’autre, d’une femme à l’autre. Matière première d’un côté, ils deviennent élément de beauté de l’autre.